Doudou, nous prenons le bus ou nous allons à pied à la gare ? Parce que nous partons de la gare de Shin-Kobe qui est plus loin que notre gare d'arrivée, Sannomiya. A pied ? Ok. toujours optimiste, Doudou, et jeune dans sa tête. Sauf que... Ça monte, il y a 2, 5 km, 2 valises, un sac à dos en cuir rempli et deux quinquas de presque 56 ans ! Nous arrivons à la gare épuisés et en nage. Heureusement que j'ai fait valider les Rail Pass hier en arrivant, il n'y a plus qu'à trouver le bon quai et attendre tranquillement le Shinkansen pour Himeji. C'est quoi Himeji ? Me demande Doudou rouge écrevisse. L'un des 12 derniers châteaux en bois du Japon, répond Mamie Patty dégoulinante. Il est considérée comme le plus beau du Japon, classé Trésor National et le premier à être classé au Patrimoine Mondial de l'Unesco en 1993.
33 minutes plus tard, en Shinkansen, nous arrivons à Himeji. Ne t’inquiète pas Doudou, nous sommes à 5 mn à pied
de l'hôtel et à 1/4 d'heure du château. Son visage se détend, il se prépare mentalement à sa tâche quotidienne : la prise de photos.
Au bout de l'artère qui démarre de la gare, le majestueux "Héron Blanc" dresse sa haute silhouette et déploie ses ailes. Né au début du XVIIe siècle,
sa beauté et sa majesté résultent d'un subtil mélange d'esthétisme et de techniques de défense poussées qui font de lui un oiseau qu'aucun ennemi ne peut capturer.
Du haut de sa colline, Shirasaji-jo (le château du héron blanc) aime admirer ses remparts défensifs dans l'eau miroitante des douves protectrices qui dessinent son image depuis des siècles.
Des Shoguns, point de trace. Seuls les blasons rappellent qu'une succession de seigneurs ont vécu ici et observé en contrebas, l'arrivée d'éventuels ennemis prêts à en découdre avec le magnifique oiseau blanc.
Imaginaient-ils à l'époque que des constructions modernes oseraient se comparer à lui ? Défieraient les courbes harmonieuses de sa tête, la blancheur immaculée de ses flancs ?
Shirasaji-jo a résisté aux incendies, aux tremblements de terre et à la 2ème guerre mondiale. Il leur survivra
longtemps encore.
Perdu au milieu d'un savant dédale de couloirs et d'escaliers destinés à perturber les assaillants, un sanctuaire devant lequel se pressent les touristes japonais. L'appareil photo, guidé par la main experte de son propriétaire, les esquive habilement.
C'est de l'extérieur que Shirasaji-jo est le plus redoutable. Nul ennemi ne se douterait que, derrière les 5 étages du donjon principal, se cachent en réalité 7 niveaux dont un en sous-sol.
L'objectif ne résiste pas à un dernier gros plan du donjon, sur ses yeux rétrécis et protecteurs. Je dois lui promettre qu'il reviendra entre chien et loup pour une ultime prise de vue.
Doudou, faut y aller. Nous devons visiter Kôko-en. C'est un jardin créé sur l'ancien site des maisons des samouraïs et inauguré en 1992 pour fêter le centenaire de la ville d'Himeji. Notre billet d'entrée pour Himeji-jo comprend également la visite du jardin. Doudou adore les jardins... Et ne gaspillera pas son ticket d'entrée pour Kôko-en.
La paix, le calme, la sérénité. Enfin. Loin du tumulte des villes, des foules de touristes du monde entier croisés depuis le début de notre voyage, je respire, ma tête se vide. Presque
personne, les visiteurs d'Himeji-jo ont disparu. Beaucoup repartent le jour même, happés par le Shinkansen qui les ramène à un point de chute plus mouvementé,
plus bruyant. Quelle erreur ! Dans leur course frénétique, ils perdent tout contact avec Mère Nature, équilibre de toute chose.
La nuit se lève sur Himeji. Shirasaji-jo nous attend. Les portes de son parc restent ouvertes pour
celui que sa silhouette magistrale n'effraie pas dans l'obscurité naissante. Himeji peut dormir tranquille, Le Grand
Héron Blanc veille.