Doudou, comme tu as été bien sage, on va se faire un Brooklyn Bridge by night. Entre nous, je n'ai pas fini de me les geler.
Mais que ne ferait-on pas par amour et, surtout, pour la paix de son ménage ! Nous remontons vers Bowling Green Park pour admirer Charging Bull, le célèbre taureau de Wall Street et ses non moins célèbres "parties
intimes". Au lendemain du krack
boursier de 1987, l'artiste Arturo Di Monica déboursa 360 000 dollars pour sculpter "le symbole de la force, du pouvoir et de l'espoir du peuple américain pour le futur". Wall
Street Bull, l'autre nom de cette œuvre, fut d'abord installé illégalement par son propriétaire devant Wall Street et
enlevé par les autorités municipales . Après une bataille juridico-artistique entre la ville de New York et Arturo Di Monica, Charging Bull campa ses sabots à Bowling Green Park. Sa silhouette massive, prête à charger, personnifie aujourd'hui le marché américain de la finance, fou et
inébranlable.
Paraît-il que si vous lui chatouillez les narines, caressez ses cornes et/ou ses testicules, vous ferez fortune. Les touristes s'agglutinent donc autour des 3,2 tonnes de bronze et des 5 mètres de long de Charging Bull devenu un incontournable à photographier.
Ben non, Doudou, je ne vais pas faire la queue pour m'amuser à caresser ses...cornes. Je suis sûre qu'on a dû le faire
lors de l'un de nos précédents séjours new yorkais. Mais si tu veux y aller, ne te gène
pas. Tout à coup, la mélancolie m'envahit. Je songe que notre séjour prend fin. Que
demain nous passerons la nuit dans un hôtel situé dans l'un des plus vieux skyscrapers de New York : The Beekman, a Thompson Hôtel. Que demain, cette dernière journée sera consacrée à
réaliser des photos sous tous les angles. Que je vais bientôt quitter ma pomme d'amour.
Il faut que nous partions vers Brooklyn Bridge, vite, très vite, s'éloigner à tout
prix des touristes et se faire avaler par la nuit froide et mordante qui tombe sur la Big Apple. Magique,
mythique, mystique...
Cycliste fantomatique, joggeur de la nuit, photographe en mal de clichés, amoureuse de New York... Malgré un froid polaire, nous nous retrouvons tous sur ce pont légendaire, aimantés, comme phagocytés.
Tels des papillons de nuit fascinés par la lumière, le photographe fou et et moi virevoltons de candélabre en candélabre et de guirlande pétrifiée en guirlande pétrifiée. Le froid n'a
plus de prise sur nous, nous sommes emportés par la fée électricité.
Des larmes de cristal coulent sur mes joues. New York étincelle dans un ruisseau de perles de lumière glacée. Jamais ville ne m'a autant fait chavirer le cœur et l'âme. New York, ma pomme d'amour. Nous allons bientôt la quitter, JE vais bientôt l'abandonner, y laisser une partie de mon cœur. New York, ma pomme d'amour, ma Golden, ma Pink Lady... New York qui me renverse comme une tarte tatin...